Unir nos forces : Les peuples autochtones fournissent un leadership international en matière de protection de la terre et de la mer

Gardiens côtiers Nuxalk, Colombie-Britannique. Mention de source : ‘Qátuw̓as Brown

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Par Frank Brown

22 février 2023

Lors d’un récent événement sur la conservation dirigée par les Autochtones, Hinano Murphy, de la société Tetiaroa située à Tahiti, a présenté une image satellite de l’océan Pacifique. Devant une salle remplie de personnes autochtones et d’alliés venus du Canada, d’Australie, de Nouvelle-Zélande, des États-Unis et d’ailleurs, elle a déclaré : « Cette étendue d’eau nous rapproche. Nous devons utiliser le pouvoir de cette eau pour la guérir, veiller sur elle et l’aimer.

Les Hawaïens ont des canots. Les Māori ont des canots. Les Premières Nations ont des canots, dit-elle. Faire corps avec l’eau, c’est une valeur que nous partageons tous. Alors pourquoi ne pas faire appel à notre pouvoir, notre voix, nos chants, nos récits pour pagayer ensemble ».

Cet appel à pagayer ensemble arrive à un moment critique. Au moment où la planète est confrontée à une intensification des changements climatiques et de la perte de biodiversité, les peuples autochtones qui vivent sur les territoires proposent des solutions. En nous rassemblant et en nous soutenant mutuellement, nous créons une dynamique qui contribuera à restaurer les terres et les mers.

Nous en avons été témoins lors de la COP15, le sommet des Nations Unies sur la biodiversité qui s’est tenu à Montréal en décembre, où les dirigeants autochtones ont souligné le fait que 80 % de la biodiversité restante de la planète se trouve sur des terres gérées par les peuples autochtones. À la fin du sommet, près de 200 pays se sont engagés à protéger 30 % des terres et des eaux d’ici à 2030 et à reconnaître les droits, les terres et le savoir des Autochtones.

Nous avons vu cette dynamique à l’œuvre également lors du congrès IMPAC5 à Vancouver en février, où des milliers de délégués ont discuté de la manière d’accroître le nombre d’aires marines protégées dans le monde. Une fois de plus, les leaders autochtones ont fourni des exemples concrets en matière de protection des océans et de la vie marine qui nourrit nos communautés, nos économies et nos cultures.

L’Initiative de leadership autochtone (ILA) a organisé des rassemblements en marge de ces deux événements mondiaux. L’ILA met principalement l’accent sur la protection des étendues terrestres, mais, de plus en plus, ce leadership autochtone issu du territoire s’exerce aussi bien sur les mers que sur les terres. Pour cette raison, l’ILA s’efforce de diffuser les leçons apprises sur ce territoire maintenant appelé le Canada, et de jeter les bases d’une collaboration internationale.

Les peuples autochtones sauvegardent les territoires qui sont des refuges essentiels dont nous dépendons pour l’avenir, c’est-à-dire des endroits où les animaux et les plantes peuvent prospérer malgré les changements climatiques et la perte de biodiversité. Quatre-vingts pour cent de la biodiversité restante dans le monde se trouve sur des territoires gérés par les peuples autochtones. Ici, au Canada, les nations autochtones ont proposé la création de dizaines d’aires protégées et de conservation autochtones, et les programmes des gardiens autochtones sont des modèles d’intendance qui ont fait leurs preuves.

Pourtant, même si les données scientifiques confirment la réussite de la conservation dirigée par les autochtones, les approches occidentales divisent généralement la conservation en une multitude de parties distinctes. La perspective autochtone met l’accent sur les interrelations, la réciprocité et l’interdépendance.

La conservation dirigée par les Autochtones concerne notre relation avec nos terres et nos mers.

Bev Sellars, leader principale de l’ILA, parle de « l’histoire d’amour » que les peuples autochtones entretiennent avec leurs territoires. Mention de source : Science World

Cette approche était à l’honneur lors d’un récent événement à l’IMPAC5 organisé par l’ILA et Science World à Vancouver et qui s’intitulait Ocean Tribes Gathering. Plus de 200 personnes ont participé à une réception où elles ont pu découvrir deux expositions :

  • Bákvḷá, qui traite de la pêche durable de harengs sur varech de la Première Nation Haíɫzaqv

  • Sacred Journey, qui porte sur la résurgence de la culture du canot dans le nord-ouest du Pacifique en lien avec le renouvellement de la relation avec le monde naturel. L’exposition explore le rôle du canot comme vecteur de décolonisation et de réapprentissage des enseignements ancestraux.

La soirée comprenait également des débats sur la conservation dirigée par les Autochtones, la souveraineté alimentaire et les économies fondées sur la conservation.

Historienne, auteure et leader principale à l’ILA, Bev Sellars a entamé la conversation par une histoire d’amour. « Quand vous aimez une personne, vous faites tout ce qui est en votre pouvoir pour la protéger. Vous vous battez pour elle, vous lui apportez les soins dont elle a besoin. Les peuples autochtones ressentent les mêmes émotions face à leurs territoires. » Aussi, Tabitha Robin, professeure à l’Université de la Colombie-Britannique, affirme : « Les poissons me disent ce dont je suis responsable, et je suis responsable des eaux ».

Tout est lié

Qu’il s’agisse d’un voyage circumpacifique à Moananuiakeaen avec la Polynesian Voyaging Society ou de l’importance de renforcer les capacités des communautés des Premières Nations à gérer des entreprises axées sur la conservation, il est véritablement question de la relation d’interdépendance qui les unit au territoire.

Nous nous trouvons à un endroit et à une période critiques au sein de la biosphère et de l’évolution humaine. Nous tentons de rester fidèles aux valeurs qui sont sources de vie et qui nous nous nourrissent. Les peuples autochtones cultivent ces valeurs au sein de leurs cultures et de leurs systèmes de connaissances. Plus que jamais, le monde a besoin de notre leadership.

Le fait de voir les peuples autochtones se rassembler par-delà les océans et les frontières me donnent de l’espoir. C’est une source d’inspiration qui nous pousse à unir nos efforts aux personnes ayant des vues semblables afin de pagayer ensemble dans la même direction.

C’est le début de la conversation. Nous continuerons à honorer notre responsabilité envers le monde naturel en mettant l’accent sur les relations et sur la notion d’interdépendance. La conservation dirigée par les Autochtones repose sur une approche systémique globale. Nous évitons les approches en silos.

Tout est lié. Et notre travail doit traduire en action cette prise de conscience.

Hinano Murphy, Frank Murphy et Dan Hikuroa parlent de leur voyage circumpacifique à Moananuiakeaen avec la Polynesian Voyaging Society. Mention de source : Science World.

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