La conservation dirigée par les Autochtones est essentielle au respect des engagements internationaux du Canada

26 FÉVRIER 2018 | L’INITIATIVE DE LEADERSHIP AUTOCHTONE

Partout au pays, les gouvernements autochtones protègent les forêts anciennes et les eaux saines. Les peuples autochtones veillent sur ces endroits depuis des millénaires et aujourd’hui, de nombreuses nations élaborent des approches novatrices visant à préserver le territoire pour les générations à venir.

Au cours des deux prochaines années, la conservation dirigée par les Autochtones gagnera en importance. Le Canada s'est engagé à conserver au moins 17 % du territoire d’ici 2020 dans le cadre de la Convention sur la diversité biologique. Actuellement, au pays, seulement 10,6 % des terres sont protégées.

Toutefois, avec l’aide des gouvernements autochtones, le Canada pourra atteindre sa cible. 

Bien que nombreuses communautés autochtones lancent des processus d’aménagement du territoire qui visent à désigner les zones à protéger pour l'avenir, le Canada ne tient pas toujours compte de ces zones dans l'atteinte de ses objectifs nationaux. Une reconnaissance accrue et un financement additionnel permettraient aux gouvernements autochtones de protéger de plus vastes étendues de territoire, aidant ainsi le Canada à respecter ses engagements internationaux en matière de conservation.

Un atout précieux pour la conservation

Dans un contexte d’affirmation de leurs responsabilités culturelles, de nombreux gouvernements autochtones participent aux initiatives d’aménagement du territoire pour définir l’avenir de leurs territoires. À l’aide de vastes consultations communautaires, de nombreuses entrevues et d’une analyse approfondie des données, les communautés déterminent les terres qu’elles veulent protéger et celles où des activités d’exploration et d’exploitation sont permises.

Le long du fleuve Mackenzie, dans les Territoires du Nord-Ouest, les Dénés du Sahtu et les Métis ont élaboré un plan d’aménagement du territoire qui honore les traditions culturelles, le savoir des aînés, de même que les sciences autochtone et occidentale. Plus de 700 représentants des communautés du Sahtu, du gouvernement, de l’industrie et des organisations non gouvernementales ont pris part à cet exercice. En 2013, au terme de ce processus, les communautés ont proposé de protéger Ts’ude niline Tu’eyeta (aussi appelée Réserve nationale de faune rivière Ramparts) ainsi que plusieurs autres endroits.

Les plans d’aménagement du territoire apportent des précisions sur l’utilisation des terres. Grâce à ces plans, les acteurs de l’industrie connaissent les endroits où les projets d'exploitation des ressources sont autorisés et les gouvernements peuvent cerner les possibilités de collaboration.

Les aires protégées autochtones

La conservation est souvent au cœur des processus d’aménagement du territoire. Il n’est donc pas surprenant que ces processus soient souvent à l’origine de l’établissement d’aires protégées autochtones, c’est-à-dire des lieux que les gouvernements autochtones ont choisi de protéger en raison de leur valeur écologique et culturelle. Ces aires reflètent les lois et la culture autochtones et visent à préserver les étendues d’eau douce, à protéger les populations d’animaux et à assurer un climat plus stable pour tous. Les aires protégées autochtones permettent aux peuples autochtones de maintenir leur lien avec ces territoires et d’en prendre soin pour les générations à venir, autochtones et non autochtones.

Les aires protégées autochtones sont généralement le fruit d’une collaboration avec les gouvernements. Elles peuvent être désignées parc national, parc tribal ou réserve d'espèces sauvages. Le titre officiel importe peu : c’est le processus qui est déterminant dans la création d’une aire protégée autochtone. Les gouvernements autochtones jouent un rôle prépondérant pour désigner les terres à protéger, établir les objectifs et gérer le territoire.

Par exemple, la Réserve de parc national et site du patrimoine haïda Gwaii Haanas au large de la côte de la Colombie-Britannique a vu le jour lorsque la nation haïda a désigné « Site du patrimoine haïda Gwaii Haanas » une zone abritant une forêt ancienne et des maisons longues à valeur patrimoniale. Aujourd’hui, la nation haïda et le gouvernement du Canada gèrent conjointement Gwaii Haanas grâce à un partenariat. Une équipe de gardiens autochtones – les gardiens haïdas – sont les intendants de ce territoire. Ils patrouillent sur la côte et accueillent les visiteurs venus découvrir les sites culturels.

Des retombées économiques pour les communautés

Plusieurs études le confirment : les parcs et les aires protégées génèrent des retombées économiques. Au Canada, chaque dollar investi par les gouvernements dans les parcs accroît le PIB de 6 $ et les visiteurs des parcs nationaux, provinciaux et territoriaux ont dépensé 4,4 milliards de dollars en 2009.

La gestion des aires protégées renforce également les économies locales. De nombreuses aires protégées autochtones sont gérées par des gardiens autochtones. Ils y veillent sur la faune, les étendues d'eau et les sites culturels. Des chercheurs rapportent que chaque dollar investi dans deux programmes des gardiens autochtones des T.-N.-O. – celui des Dénés NiHat'ni et celui des K'ehodi du Dehchoa –  génère 2,50 $ en valeur sociale, culturelle, économique et environnementale.  Avec un financement suffisant, cette valeur pourrait atteindre 3,70 $ pour chaque dollar investi.

L’expérience australienne démontre qu’un financement fédéral soutenu peut engendrer des retombées plus importantes encore. Les aires protégées autochtones représentent près de la moitié des réserves de parc national – 75 aires désignées qui s'étendent sur plus de 670 000 km2  – et employaient en 2016 près de 2 600 rangers autochtones à temps plein ou à temps partiel.

Une étude récente portant sur cinq aires protégées autochtones démontre qu’un investissement de 35,2 millions de dollars provenant du gouvernement australien et d’autres sources a généré des retombées sociales, économiques, culturelles et environnementales d’une valeur de 96,5 millions de dollars entre 2009 et 2015.

Une avenue vers la réconciliation

Honorer les aspirations des peuples autochtones à l’égard du territoire est essentiel au succès de la réconciliation. Le lien avec le territoire est au cœur de l’identité et de l’affirmation de la nationalité autochtone. Lorsque les gouvernements acceptent et reconnaissent cette réalité, la relation de nation à nation s’en trouve renforcée.

Dans le passé, on a souvent déplacé les peuples autochtones pour créer des parcs et on les a exclus des décisions concernant la gestion de ces parcs. Aujourd’hui, les approches dirigées par les Autochtones peuvent et doivent aider à définir l’avenir de la conservation au Canada. Les gouvernements peuvent établir de meilleurs partenariats avec les Autochtones en soutenant financièrement les aires protégées autochtones et en reconnaissant l’apport des peuples autochtones au respect des engagements du Canada.


La réconciliation repose sur le lien des Autochtones avec le territoire. Les aires protégées autochtones contribuent à solidifier ce lien, tout en favorisant le renouvellement de leur relation avec les gouvernements et avec les Canadiens.

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Résolution de l’Assemblée des Premières nations : Aires protégées et préservées autochtones – Initiative En route vers l'objectif 1 du Canada : « Préservation 2020 »

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Analyse de la valeur actuelle et future de la contribution des gardiens dans les T. N.-O.