Une nouvelle aire protégée autochtone respectueuse des gens et du territoire

Par Valérie Courtois

À environ 185 km au nord de Yellowknife, la Première Nation des Dénés de Lutsel K'e a établi l’une des plus vastes aires protégées en Amérique du Nord. Les Dénés vivent sur le territoire de Lutsel’Ke depuis des millénaires et s’y sentent chez eux. Cette région s'étend le long de la rive est du Grand lac des Esclaves. Par-delà les immenses falaises qui plongent dans le lac se trouvent de vastes étendues de forêt boréale puis de toundra luxuriante. Le caribou, le bœuf musqué, l'orignal et des dizaines de milliers d'oiseaux chanteurs et de sauvagines ont élu domicile sur ces terres. Et une mosaïque de zones humides, de lacs et de cours d'eau fournissent de l’eau propre à toute la région.

Le 21 août, la Première Nation des Dénés de Lutsel K’e a conclu une entente avec Parcs Canada et le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest afin de protéger de façon permanente 26 376 kilomètres carrés de ce territoire plein de vie. Cette région, appelée Thaidene Nëné, est une aire protégée autochtone dont diverses parties ont été désignées comme parc national, parc territorial et aire de conservation de la faune. La Première Nation des Dénés de Lutsel K'e participera à la gestion conjointe de l’ensemble de ce territoire.

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Cette nouvelle aire protégée témoigne des résultats exceptionnels de la conservation dirigée par les Autochtones. Dans tout le pays, les nations autochtones protègent les animaux, les plantes et les eaux en créant des aires protégées et des programmes des gardiens autochtones.

Les résultats parlent d'eux-mêmes. De récentes études des Nations Unies, de l’Université de la Colombie-Britannique et d'autres organismes confirment ce que nous savons depuis des générations : les terres gérées par les peuples autochtones sont plus vivantes et en meilleur état que celles d’autres régions.

La conservation dirigée par les Autochtones est efficace parce qu'elle permet aux peuples d’honorer leur lien avec le territoire. Elle repose sur la reconnaissance des effets bénéfiques d’une gestion respectueuse du territoire sur les troupeaux de forêts caribous, la migration des saumons et la vitalité de nidification des oiseaux chanteurs. Dans les communautés autochtones, le travail des gardiens s’appuie sur les lois autochtones, le savoir traditionnel transmis de génération en génération et sur la responsabilité culturelle qui leur incombe de veiller à la protection du territoire.

Les membres de la Première Nation des Dénés de Łutsël K’e se sentent responsables de Thaidene Nëné.

J’ai eu la chance d’aller à Thaidene Nëné. Je me souviens de m'être rendue dans un camp en forêt et, autour d'un repas composé de truite de lac, de banique et de thé, des rangers dénés de Ni hat'ni ont témoigné de leur rôle de gardiens. Ils parlaient de la surveillance des populations de caribous, de l’analyse de la qualité de l'eau et de l'accueil des visiteurs. Ils décrivaient leur travail avec beaucoup de fierté et manifestaient un profond respect envers les aînés, qui partagent avec eux leur savoir. Ils adorent se retrouver en nature.

Ils veillent sur le territoire, et le territoire veille sur eux.

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Maintenant plus que jamais, nous avons besoin de ce modèle de conservation. Une crise écologique bouleverse la planète et des milliers d'espèces animales et végétales disparaissent à un rythme alarmant. Dans le cadre des efforts internationaux visant à renverser la vapeur, le Canada s'est engagé à protéger 17 % des terres et des eaux d'ici 2020.

Les initiatives de conservation mises en place par les nations autochtones, comme Thaidene Nëné – constituent la meilleure voie à suivre pour protéger de vastes territoires. Le gouvernement du Canada a reconnu ce leadership autochtone. Le 19 août, la ministre d'Environnement et Changement climatique, Mme Mckenna, a annoncé le financement d'une série de projets de conservation, dont 27 aires protégées et de conservation autochtones.

Il s’agit d’un important pas en avant. Mais beaucoup d’autres nations et communautés autochtones souhaitent agir à titre de partenaires en matière de conservation. Un financement à long terme nous permettra de protéger davantage de terres, d’animaux et d’étendues d'eau dont dépendent tous les Canadiens. Nous pouvons déployer ces initiatives dans toute la forêt boréale.

« Dans le Nord, les communautés ont accompli des choses extraordinaires, affirme Steven Nitah, négociateur principal de la Première Nation des Dénés de Lutsel K'e. La nature – son immensité – influence notre perception du monde. Qu'importe l’objectif, il faut voir grand pour qu’il se réalise. Thaidene Nëné en est un parfait exemple ».

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