Une récente étude démontre les effets positifs des programmes des gardiens sur les gens et le territoire
Par Valérie Courtois
L’été est une période très occupée pour les gardiens autochtones. Sur la rive est du Grand lac des Esclaves, les gardiens dénés Ni Hat’ni surveillent la qualité de l'eau dans les terres humides où des dizaines de milliers d’oiseaux migrateurs élèvent leurs petits. Dans les forêts du nord de la Colombie-Britannique, les gardiens du territoire du Yunesit’ni utilisent des techniques traditionnelles de gestion des incendies dans cette région ravagée en 2017 par des feux de forêt sans précédent. Ailleurs, dans la baie Georgienne, des gardiens des écosystèmes traditionnels anishinaabe protègent les espèces en péril et luttent contre les effets des changements climatiques dans un archipel de forme allongée qui sert de corridor naturel pour le passage des animaux.
Partout au pays, le même constat s’impose : la contribution des gardiens autochtones permet de protéger les terres et les eaux dont nous dépendons tous. Ils s’attaquent également à certains des enjeux environnementaux les plus difficiles de notre temps, comme les changements climatiques et le déclin des populations d’animaux et de plantes.
Un nouveau rapport confirme les retombées positives du travail des gardiens sur les terres, les gens et l'économie.
Le rapport « The Case for a Guardian Network Initiative », publié conjointement par le Environmental Law Centre de l’Université de Victoria et le Conseil de l’énergie et des mines des Premières Nations de la Colombie-Britannique, présente une vue d’ensemble des programmes des gardiens de la C.-B. et du reste du pays.
Il révèle que les programmes des gardiens autochtones engendrent des résultats avérés autant pour les peuples des Premières Nations que pour les Canadiens non autochtones. Il conclut que le financement d’un réseau national en soutien aux programmes des gardiens permettrait d’étendre les avantages économiques, sociaux et environnementaux à tout le pays.
La conservation dirigée par les Autochtones fonctionne parce qu'elle honore le lien entre les peuples et le territoire. Le rapport relate les effets bénéfiques d’une gestion respectueuse du territoire sur les troupeaux de caribous, la migration des saumons et sur la vitalité des aires de nidification des oiseaux chanteurs.
Les programmes des gardiens constituent exemple fort de l’affirmation de la responsabilité culturelle des Autochtones de veiller sur le territoire. Et comme l’indique le rapport, permettre l'exercice de cette responsabilité profite à tout le monde.
Parmi les résultats positifs mis en lumière dans le rapport, notons :
Bons pour le territoire : Grâce à leur formation basée à la fois sur la science autochtone et la science occidentale, les gardiens contribuent au maintien d’une abondance d'animaux et de plantes. Le rapport décrit de quelle façon l'Okanagan Nation Alliance a réussi à rétablir la population de saumon rouge, alors menacé de disparition, en rétablissant son habitat dans le centre-sud de la Colombie-Britannique et en veillant à la santé de cette espèce.
De nombreux gardiens participent également aux processus d’aménagement du territoire et à la gestion de vastes aires protégées et de conservation autochtones. Le rapport souligne que cette forme d’intendance permettra au Canada de respecter ses engagements en matière de biodiversité, notamment celui de protéger 25 % des terres d’ici 2025.
Bons pour les gens : Les programmes pour les gardiens offrent une formation et des opportunités ancrées dans la culture. Des études démontrent qu’ils renforcent la confiance et le sentiment de fierté des gardiens et améliorent la santé et le bien-être des communautés. Ils sont par ailleurs une source d’inspiration pour jeunes autochtones. Ces programmes leur permettent de donner un sens à leur vie et de nouer des liens avec les aînés.
Les programmes des gardiens renforcent également la nationalité autochtone. Les gardiens recueillent des données de base qui serviront à l'élaboration des plans d’aménagement du territoire et guideront la prise de décision en matière d’exploitation des ressources. La nation Skwxwú7mesh stelmexw (Squamish), par exemple, a lancé un processus d’analyse du projet de gaz naturel liquéfié Woodfibre. Après avoir soigneusement analysé elle-même les données, la nation a autorisé la réalisation du projet sous certaines conditions.
Bons pour l'économie : Les programmes des gardiens offrent des emplois bien rémunérés dans les petites communautés. Leurs achats d’embarcations, de motoneiges et d’autres équipements profitent aux entreprises locales. Bien souvent, les programmes des gardiens stimulent les activités d’entreprises touristiques dirigées par des Autochtones. Le rapport précise également que le programme d’intendance et des gardiens Ahousaht assure la gestion d’une entreprise de tourisme responsable de délivrer des permis aux visiteurs du Maquinna Marine Park et de leur fournir de l’information.
Le rapport conclut qu'un investissement fédéral à long terme permettra d'étendre ces avantages à l'ensemble du pays en aidant à la mise sur pied de multiples programmes des gardiens et à la création d'un réseau pour étendre l’offre de formation et de recherche au sein des différents programmes.
Dans le cadre des travaux de l'Initiative de leadership autochtone visant à promouvoir et à soutenir les programmes des gardiens, nous avons pu constater sur le terrain les résultats positifs présentés dans cette étude. Le rapport confirme une fois de plus le rôle essentiel que jouent les gardiens au bénéfice de leurs nations, du territoire et de nous tous.